Veux-tu être mon ami ?

Plusieurs d’entre vous en ont déjà entendu parler, j’en suis certaine, de cette fameuse période qui se termine vers l’âge de 4 mois où votre chiot doit «idéalement» rencontrer quelques autres chiens pour être gentil. Pourtant, la socialisation, c’est bien plus que ça. Cet article a pour but de mettre en lumière plusieurs faits intéressants sur cette période critique chez le chiot, mais aussi de vous donner les meilleures techniques pour une socialisation réussie!

Tout d’abord, la socialisation ne comprend pas seulement l’apprentissage de ce qu’«est» un autre chien. Le chiot, tout comme un nouveau-né humain, ne connaît pas grand-chose du monde dans lequel il naît. Les chiots ont un besoin et un désir d’explorer leur environnement dès leur plus jeune âge (3 semaines). Lors de cette période d’exploration, le chiot apprend que certaines situations, objets et êtres vivants sont ou ne sont pas dangereux. Toutes les expériences sont alors enrichissantes, même celles que nous pourrions considérer comme étant négatives, sont parfois positives pour le chiot. Par exemple, s’il mord trop fort sa mère, celle-ci le corrigera et le chiot apprendra donc à contrôler sa morsure, ce qui est positif.

À cet âge, le chiot prend contact avec le monde extérieur et cherche à entrer en contact avec, particulièrement, les êtres vivants de toutes espèces. Il est important de savoir que cette attirance pour la construction des relations sociales inter et intra spécifiques commence à diminuer dès l’âge de 6 semaines[1]. Il faut donc en profiter pour exposer le chien à plusieurs espèces (chat, lapin, oiseau, etc.) afin qu’il puisse les reconnaître comme étant amis et sécuritaires (nous en reparlerons plus tard). Lorsque cette attirance vers le monde extérieur diminue, le chiot entre dans une nouvelle mentalité: tout ce qui est nouveau est potentiellement dangereux. C’est pourquoi vous pouvez observer certaines nouvelles attitudes, comme votre chiot qui allonge son corps au maximum pour s’approcher d’une nouvelle personne ou objet. Il a de l’intérêt mais il reste sur ses gardes! À noter par contre que ces nouvelles réactions dépendent de plusieurs facteurs, comme le tempérament et la personnalité de votre chiot (voir l’encadré « Saviez-vous que…»).

Un peu de science !

Les études s’accumulent de plus en plus pour étudier le développement du cerveau chez le chiot et son influence sur son comportement futur. Grâce à celles-ci, nous savons que le cerveau du chien commence à se développer alors qu’il est encore dans le ventre de sa mère et continue jusqu’à l’âge d’environ 3 mois. Ce développement se divise en trois phases importantes :

  • La croissance
  • L’organisation
  • Le « suicide »

Pour ce qui est de la croissance, il faut savoir que le chiot naît avec des millions de cellules nerveuses dans son cerveau, communément appelées « neurone s». Jusqu’à l’âge d’environ dix semaines, ces cellules produisent des filaments ou synapses (du grec signifiant « connexion ») pour entrer en contact entre elles. Cependant, bien que plusieurs connexions soient établies entre les cellules, elles sont désorganisées et très complexes. C’est ce qui nous amène à la deuxième phase du développement.

C’est vers la cinquième et la septième semaine de vie que l’organisation commence. Les connexions entre les neurones (synapses) doivent être activées afin d’assurer cette organisation. Grâce à cette activation, la synapse va mûrir. À l’inverse, les synapses n’ayant pas été activées resteront immatures. Afin de simplifier un peu le tout, prenons l’exemple que nous dessinons au crayon à mine sur une feuille de papier deux cercles, représentant les neurones, et que nous traçons une ligne pour les relier (synapse). Si nous ne traçons qu’une seule fois la ligne, elle sera bien facile à effacer, n’est-ce pas ? Par contre, si nous la traçons et la retraçons encore et encore et qu’on y ajoute un trait de stylo, il sera difficile de s’en débarrasser.

synapse entre deux neurones

Image 1: Voici une représentation simplifiée de l’exemple donné. Le trait rouge représente la synapse entre deux neurones. Dans l’image de gauche, il n’y a qu’un trait, signifiant qu’une connexion est établie, mais sans plus. Dans l’image de droite, plusieurs traits rouges ainsi qu’un trait noir (stylo) représentent l’activation de la connexion.

Ensuite, puisque le cerveau ne peut rester dans le désordre, il se passe une phase dite «suicide» des synapses inutiles (immatures). Durant cette phase, le cerveau enverra des enzymes suicidaires afin de détruire les synapses et cellules nerveuses qui ne servent à rien. Ça, c’est un peu comme si vous preniez une gomme à effacer pour éliminer tous les traits de crayon qui ont été faits à la mine. Il ne vous restera que vos neurones reliés par un trait de stylo. La gomme à effacer aura alors fait le même travail que les enzymes du cerveau. Cette phase débute vers la septième semaine, chevauchant la phase de l’organisation, et se termine vers la seizième semaine (~4 mois), coïncidant donc avec la fin de la période de socialisation.

La question ultra-méga importante !

Comment est-ce que je trace un trait de stylo entre les neurones de mon chiot ?

Durant la période de socialisation du chiot, l’accumulation d’expériences et leurs répétitions seront majoritairement responsables de la création d’une base solide pour les connexions neuronales (le trait de stylo). Par exemple, si le chiot se fait donner un jouet qui couine, il apprendra très vite que ce jouet et ce bruit ne sont pas dangereux. Chaque exposition au jouet, et chaque couinement, activeront les neurones et synapses, créant ainsi un trait de stylo. Il faut prendre en compte plusieurs aspects du chiot durant la socialisation :

  1. La personnalité du chiot. Chaque chiot est différent et vient avec son propre bagage génétique et ses propres expériences (chien d’éleveur, chien de refuge, chien d’animalerie, chien de particulier, etc.). Il est donc important de faire un programme de socialisation particulier selon chaque chiot. Regardez au-delà de la race et observez le chiot tel qu’il est.
  2. La qualité. Il est primordial de créer des associations positives pour chaque situation/expérience que vit le chiot. Les récompenses (friandises/jouets/caresses) sont une belle méthode en renforcement positif pour créer de belles associations.
  3. La quantité. Élaborer un plan de match et se fixer des objectifs selon la personnalité de votre chiot aidera à bien réussir sa socialisation. Nous y reviendrons plus tard avec la Grille de révision Beli.
  4. Le langage du chiot. Votre chiot vous parle constamment, essayez d’y porter une attention particulière.
le saviez-vous BELI

La socialisation, ce n’est pas une option

On entend encore trop souvent que les gens ne tiennent pas compte de cette période pourtant si cruciale chez le chiot. Investir du temps pour son chiot lui permettra de devenir un adulte confiant et équilibré, capable de s’ajuster dans différentes situations et évènements. Par exemple, votre chien saura comment agir lorsque vous recevez des gens à la maison, l’amenez en visite à chez des amis, le faites garder par un membre de la famille, etc.

De bien socialiser votre chiot minimise les risques qu’il développe :

  • Des phobies et des peurs
  • De l’agressivité
  • Le syndrome de privation sensoriel (syndrome du chenil)
  • De l’anxiété et du stress
  • Des comportements de types «hyper»
  • De la prédation

Il ne faut pas oublier que non seulement vous réduirez considérablement le stress de votre chien, mais il en est de même pour votre stress à vous aussi. Nous avons tous déjà vécu ce moment où nous amenons notre animal dans un nouvel environnement et que nous sommes pas certain de ce que sera sa réaction. Par exemple, la première fois que vous amenez votre chien au café canin de votre coin. Si votre chien n’a jamais été en contact avec d’autres chiens en laisse, qu’il ne connaît pas les foules ou les endroits restreints, il vivra un plus grand stress, et vous aussi, la ou les premières fois que vous l’amènerez. Offrir la socialisation à son chiot, c’est lui offrir la capacité de s’adapter aux environnements auxquels il sera exposé.

La grille de révision BELI pour vous aider avec la socialisation

La grille de révision Beli permet d’établir un plan afin de bien réussir la période de socialisation. Elle suit un système bien simple : familiariser votre chiot au plus de stimulus/situations possible avant l’âge de 4 mois. Afin de classifier le travail fait de celui qui reste à faire, la grille de révision utilise des pictogrammes qui sont le guide de survie du chiot.

Les voici :

Grille de révision BELI

Puisque le chiot ne peut aller sur Internet ou lire des livres pour en apprendre davantage sur le monde dans lequel il vit et comment s’y comporter, tout passe par les expériences vécues. Il utilise donc son propre guide de survie pour y arriver. Durant la période de socialisation, nous voulons qu’un maximum d’information chemine dans la boîte « familier et sécuritaire ». Chaque impression et expérience, positive ou négative, que vivra le chiot durant cette période aura des répercussions durables pour le reste de sa vie.

À quoi socialiser exactement ?

Puisque le chiot ne peut aller sur Internet ou lire des livres pour en apprendre davantage sur le monde dans lequel il vit et comment s’y comporter, tout passe par les expériences vécues. Il utilise donc son propre guide de survie pour y arriver. Durant la période de socialisation, nous voulons qu’un maximum d’information chemine dans la boîte « familier et sécuritaire ». Chaque impression et expérience, positive ou négative, que vivra le chiot durant cette période aura des répercussions durables pour le reste de sa vie.

La bonne réponse serait simplement : à tout ! Mais essayons d’établir des catégories.

  • Les humains

Le genre humain a énormément de différences. Il y a des hommes, des femmes, des grands, des petits, des jeunes et des vieux, etc. Et à tout ça, on peut ajouter toutes sortes d’accessoires : des lunettes, une chaise roulante, un chapeau, un manteau, une canne, des mitaines, etc. Il faut donc faire rencontrer des individus différents à votre chiot afin qu’il puisse tous les reconnaître comme des humains « familiers et sécuritaires » (boîte verte du guide de survie). Pour ce qui est des groupes d’âge, n’oubliez pas que les enfants sont très différents des adultes. Les bébés émettent des bruits singuliers, les jeunes de moins de 4 ans font des mouvements brusques et souvent inattendus. Il faut respecter le rythme du chiot et toutes ces interactions devraient être positives. Utilisez un système de récompense pour faciliter l’association positive à chaque expérience. Également, les interactions un à un, surtout pour les enfants, sera préférable pour le chiot, surtout pour commencer. Voici quelques conseils pour une belle rencontre avec un enfant :

  • Il devrait toujours y avoir un adulte pour superviser ;
  • Ne forcez jamais un chiot à interagir avec un enfant. Il pourrait vivre cette expérience négativement et craindre la présence d’enfants dans le futur ;
  • Ne jamais laisser votre chiot poursuivre les enfants qui courent. Orientez-le plutôt sur un autre comportement qui peut être un travail d’obéissance, un jeu ou autre ;
  • Donnez vous-même les friandises au chiot ou demandez à l’enfant de les mettre au sol. Ceci permettra d’apprendre au chiot de ne pas prendre la nourriture dans les mains des enfants.

(2) Aux autres animaux

Durant la période de socialisation, votre chiot doit entrer en contact avec toute sorte d’animaux afin qu’il les catégorise comme étant des amis et donc encore une fois, dans sa boîte « familier et sécuritaire ». Nous ne voulons certainement pas que des petits animaux comme des chats ou des lapins soient catégorisés comme des proies à poursuivre. Il est important de savoir que la socialisation aux autres espèces comme les chats nécessite davantage de répétitions afin de s’ancrer à long terme dans le comportement du chiot. De plus, un chat à l’intérieur ne sera pas perçu de la même façon qu’un chat à l’extérieur, donc il est important de généraliser les situations. Ce sera donc le moment de vous trouver des amis avec des chats afin de créer plusieurs situations différentes pour votre chiot. Vous faites donc une pierre deux coups en voyant vos amis et en faisant la socialisation.

Si jamais vous n’avez pas de chats et ne connaissez personne dans votre entourage qui en a un, pensez à demander à votre vétérinaire s’il y en a un en clinique comme « mascotte ». Vous pourrez y aller régulièrement et dire bonjour aux membres du personnel humain et félin ! Généralement, ces chats de clinique sont habitués à la présence des chiens et ont un comportement très équilibré en leur présence. Par le fait même, vous pourrez habituer votre chiot à la clinique vétérinaire.

(3) Aux autres chiens

Les rencontres entre chiens permettent au chiot de développer son langage canin. L’espèce canine a aussi, tout comme les humains, plusieurs particularités. Certaines races, comme les Carlins (Pugs), peuvent sembler étranges pour les chiots puisqu’ils ont un nez différent et parfois émettent des sons comme des ronflements. De plus, la texture du poil et/ou la couleur peuvent avoir un impact sur la reconnaissance de ses congénères. C’est-à-dire que si votre chiot reconnaît les chiens au poil lisse, cela ne veut pas dire qu’il acceptera ceux au poil frisé ! Sinon, tout comme les humains, certains chiens ont des accessoires, soit par choix de leur propriétaire ou par nécessité, comme un manteau en hiver. Il serait important que votre chiot reconnaisse le chien habillé comme un membre de son espèce et non comme un extraterrestre à l’allure d’un chien ! Voici quelques conseils pour une rencontre entre chiens réussie :

  • Avant de laisser votre chien entrer en contact avec un autre chien, assurez-vous que celui-ci a bien été socialisé. Nous ne voulons pas un chien réactif comme première expérience ;
  • Ne pas toujours faire des rencontres en laisse. Cela empêche le chiot de bien communiquer son langage corporel et le limite dans ses mouvements, comme la fuite (s’éloigner), s’il ne se sent pas bien ;
  • Si la rencontre est faite en laisse, assurez-vous qu’il n’y ait aucune tension sur la laisse. Deux chiens qui tirent sur leur laisse peuvent passer d’une émotion joyeuse « je veux aller le voir ! » à une émotion de colère « pourquoi tu ne me laisses pas aller le voir ! » et donc lorsque le contact se fait, le chien n’est plus dans une belle émotion de rencontre ;
  • Si vous avez des doutes sur l’autre chien, travaillez plutôt à distance avec votre chiot afin de lui apprendre à garder son calme en présence d’un autre chien. Faites un exercice de « focus » sur vous et récompensez-le s’il reste calme et vous regarde.

(4) À différents sons et objets

Seriez-vous surpris d’entendre qu’il existe des vidéos Youtube de bruits de balayeuse, de séchoir, de feux d’artifices, des pleurs de bébé, de tonnerre, de tondeuse et de souffleuse ? Tous ces bruits sont à la base inconnue pour votre chiot et peuvent être épeurant. Lors de période de jeu avec lui, profitez-en pour faire jouer des sons sur votre ordinateur afin qu’il s’habitue graduellement à ceux-ci. La période de jeu lui permettra de se concentrer sur autre chose et de vivre une expérience amusante tout en entendant ces bruits. L’important est de commencer avec un volume à faible intensité et d’augmenter graduellement.

De plus, n’oubliez pas que certains objets ont une apparence douteuse pour votre chiot. Les parapluies, les balais ou les vadrouilles, par exemple. Vous pouvez déposer l’objet au sol et y déposer des gâteries tout autour afin que votre chiot s’en approche de façon positive. Si vous voyez qu’il n’est pas à l’aise, disposez les gâteries un peu plus loin. Il faut toujours respecter son rythme.

(5) L’exposition à de nouveaux environnements

Voir, toucher, sentir, entendre et même goûter devrait être ce qu’il y a de plus important pour votre compagnon durant sa socialisation. C’est ainsi qu’il découvre son environnement.

Lorsque vous arrivez à un nouvel endroit, par exemple un terrain de baseball, laissez le temps à votre chiot de prendre les informations qu’il a besoin de prendre, tout en le récompensant. Un nouveau monde s’offre à lui. Il faut donc lui laisser le temps d’explorer l’environnement avec tous ses sens.

Débutez la socialisation à de nouveaux endroits/environnements graduellement. Vous pouvez vous rendre dans des endroits plus calmes pour commencer et tranquillement augmenter le niveau de difficulté avec des places plus achalandées.

Afin de limiter les chances que votre chiot soit surexposé à certains stimuli lors de ses nouvelles explorations, il est possible de vous procurer un Dossard d’entraînement BELI (disponible sur le site internet) pour vous aider. Ce dossard demandant de respecter le besoin d’espace du chiot, lui offrira la chance d’explorer calmement son environnement.

Et ce n’est pas fini, ce n’est qu’un début

Tout cet article est dédié à l’importance de la socialisation avant l’âge de 4 mois. Cependant, le travail ne s’arrête pas là. Ce n’est pas parce que votre enfant a appris à partager ses jouets étant jeune qu’il ne décidera pas de garder tous ses m&m pour lui dans la cafétéria du secondaire. En d’autres mots, si vous appliquez tout ce qui a été dit plus haut avec votre chiot, vous lui aurez donné une très bonne base pour son savoir-vivre.

Par contre, il faut continuer d’entretenir cette fondation afin qu’elle reste solide pour le futur. L’adolescence est un moment crucial pour cet entretien puisque nous observons un ‘boom’ génétique et que de nouveaux comportements sont souvent exprimés. Nous voulons donc être certain que notre ado reste en contact avec d’autres chiens, par exemple, pour qu’il continue d’adapter son langage canin.

Un cours de maternelle et socialisation

BELI Concept Canin offre des cours de maternelle et socialisation pour les chiots âgés entre 8 et 16 semaines qui sont axés sur la socialisation et la compréhension du comportement canin afin de favoriser une belle relation avec votre nouveau compagnon.

Lecture complémentaire

Visionnez notre capsule vidéo sur la socialisation du chiot juste ici  « Capsule » 

Source

[1] Paul, Anne-Lise. Module 1: Communication et Psychologie canine. Note de cours p.30.