« Mon chien détruit tout! », « je ne lui donne pas de jouet, il les brise tout de suite! », « il mange mes souliers, mes bas, tout ce qui se trouve sur son passage! ». Ces phrases sont très souvent entendues par les intervenants en comportement canin. Si votre Fido est une petite déchiqueteuse, cet article est pour vous. Nous nous attarderons à expliquer la fonction de ce comportement pour le chien, nous vous aiderons à déterminer les limites de la normalité du comportement et finalement, nous vous donnerons diverses avenues pour tenter de diminuer l’incidence de ce comportement indésirable.
FONCTION DU COMPORTEMENT
Un chiot ou un chien « ado » qui mordille n’a rien d’anormal. En effet, en bas âge, le chiot a un urgent besoin de mordiller et de mâchouiller puisque ses dents poussent et tout comme chez les bébés humains, mâchouiller fait du bien. On sera souvent porté à excuser un chiot qui grignotera un soulier ou un coin de tapis, mais quand le chien grossit, l’importance des destructions deviendra proportionnelle à sa grosseur. Il ne s’attaquera plus simplement à un bout d’escarpins ou un bout de linge à vaisselle, non, ses « proies » seront plus grosses! Et à ce moment, le comportement deviendra plus qu’indésirable pour tout propriétaire de chien.
Donc le chiot mordille et grignote pour faire ses dents. De plus, afin de maximiser le développement de son cerveau et des connexions nécessaires, le chien est poussé par un besoin d’exploration durant la phase de socialisation (phase d’attraction). Les connexions (synapses) sont donc stimulées par les 4 récepteurs sensoriels, soit la vue, l’odorat, l’ouïe et le toucher. Comme l’enfant en bas âge, le chiot découvrira l’environnement qui l’entoure à l’aide de sa « bouche », je vous laisse donc deviner la suite!
Pourquoi un chien adulte détruit encore des objets, même après que la période des dents et d’attraction envers l’environnement soit terminée?
Le Dr Joël Dehasse nous explique que chaque comportement émis implique un besoin génétique de produire le comportement, une partie acquise (le chien a appris et a été renforcé dans l’émission du comportement) et une partie plaisir (oui le chien prend plaisir à détruire!). [1] Je vous entends dire : « Et puis zut! On ne pourra jamais l’arrêter! » Ne vous découragez pas, les solutions viendront un peu plus loin!
LIMITES DE LA NORMALITÉ DU COMPORTEMENT
On comprend maintenant qu’il est normal qu’un chien détruise. Mais comment être sûr que notre fidèle Médor est vraiment normal dans son comportement? Que ce n’est pas excessif? Que ce n’est pas un problème plus grave?
Il faudra observer notre compagnon à quatre pattes. Peut-on dire que le contexte dans lequel il détruit des objets est « approprié »? Vous me direz d’emblé que non! Bien sûr! Mais si on y regarde de plus près, probablement que si on remplace la botte d’hiver du plus jeune par un os ou un Kong, et que l’on réévalue la scène, elle nous semblerait tout à fait appropriée, voire banale!
Voyons maintenant l’intensité du comportement en lien avec la facilité avec laquelle on peut interrompre le comportement. Si on est facilement capable de stopper notre petit broyeur par un mot ou un claquement de mains, le comportement est encore « normal ».
Finalement, si le fait de gruger n’empêche pas le chien d’exprimer tous les autres comportements normaux comme s’abreuver, manger, éliminer, nous pouvons déterminer que le comportement est encore dans les limites de la normalité.
Toutefois, si le contexte est inapproprié, que l’intensité est élevée, que l’on a du mal à interrompre le comportement et que le chien est bloqué dans l’acte de gruger au point de ne pas exprimer les autres comportements de façon normale, alors il faudra investiguer plus loin afin de s’assurer que le chien ne souffre pas d’une pathologie du comportement. [2]
AVENUES ET PISTES DE SOLUTIONS
Si votre chiot est encore jeune et qu’il a commencé à gruger, détruire et mordiller, il sera relativement facile de gérer le comportement. Vous pouvez utiliser un signal verbal (qui sera toujours le même dans cette situation) que vous direz doucement, rien ne sert de crier! Il pourrait s’agir d’un mot comme « non », « stop », « uh-uh » ou encore « c’est fini » et ensuite retirer doucement l’objet qui se trouve en sa possession. Il s’agit d’un chiot, il a droit à l’erreur, rien ne sert de se fâcher et d’employer des méthodes coercitives. Il sera important ensuite, de rapidement offrir à votre chiot un objet approprié à gruger (ex. : une peluche, une balle, un jouet à gruger de style KongMD). Si petit Coco n’arrête pas de gruger la patte de la table de la cuisine, vous pouvez faire un petit bruit, exemple, un sifflement pour le distraire. Le but ici n’étant pas de lui faire peur, mais bien de stopper le comportement. Si vous avez à faire peur à votre chien pour l’arrêter, c’est que votre intervention était inappropriée ou que le timing n’était pas le bon.
Dès que le comportement cesse, rappelez-vous qu’il est très important d’encourager l’émission d’un comportement approprié. En l’absence de cette information, Snoopy recommencera sans aucun doute le grignotage.
Les chiots sont à la recherche constante d’informations. Vous leur procurez des informations quand vous répondez à leurs comportements et par la façon dont vous y répondez. Arrêter le comportement est important, mais il est également sinon plus important encore de récompenser la cessation du comportement indésirable avec un comportement qui est agréable et plus approprié. Souvenez-vous qu’un chiot c’est très énergique et qu’il dépensera votre énergie bien avant d’avoir dépensé la sienne. Vous vous devez d’être vigilant en tout temps. Bien sûr, il y aura des moments où vous n’aurez ni l’énergie, ni l’envie de superviser votre petite Sally. C’est normal! Nous avons tous une vie, métro, boulot, dodo! Dans ces cas, assurez-vous d’installer la bête dans un endroit sécuritaire avec des jouets et/ou de la nourriture sécuritaire à gruger jusqu’à ce que vous retrouviez l’énergie de superviser votre petit lapin Énergizer.
Vous pouvez également télécharger notre Guide complet sur le mordillage pour obtenir encore plus de trucs et conseils sur la résolutions de ce problème.
Il est possible aussi de faire appel à un service de gardiennage à domicile ou de promenade qui viendra vous aider à faire dépenser son surplus d’énergie à votre compagnon poilu. Peut-être même qu’un voisin ou un membre de votre famille pourrait vous donner un coup de pouce! [3] En fin de compte, un chiot et même un chien adulte a besoin de beaucoup d’exercice et de stimulation mentale.
En effet, si l’on reprend la formule de l’activité générale proposée par le Dr Dehasse, on comprend que le chien a besoin d’une variété d’occupations quotidiennement afin de vivre une vie équilibrée. Les activités alimentaires, locomotrices, vocales, masticatoires, de jeux et intellectuelles sont les éléments essentiels d’une journée de chien. Et il faut savoir que les activités de stimulation mentale sont celles qui fatiguent le plus. Si l’on veut diminuer une des activités, il est nécessaire d’en augmenter une autre. Par exemple, si on désire que Pitou gruge moins, on devra le faire bouger plus! Chaque chien a un besoin d’activité qui lui est propre. Certains auront besoin d’un total de deux heures d’activité par jour, d’autres auront besoin de plus de six! [4]
En conclusion, si votre petit copain à quatre pattes gruge et grignote, tentez de prendre un peu de recul par rapport au comportement (je sais que ce n’est pas une tâche facile!). Comprenez d’abord que c’est un comportement normal… Oui, indésirable, mais tout de même normal. Attardez-vous à déterminer si le comportement est dans les limites de la normalité et finalement mettez en application les trucs que l’on vous a donnés un peu plus haut. Si vous avez du mal à atténuer le problème par vous-même, n’hésitez pas à faire appel à un intervenant en comportement canin qui saura vous accompagner tout au long du processus.
SOURCES
[1] Dehasse, Joël. Tout sur la psychologie du chien, éditions Odile Jacob, 2009, p. 48-49.
[2] Overall, Karen. Manual of Clinical Behavioral Medecine for Dogs and Cats, Elsevier, 2013, p. 162
[3] Idem, Overall, Karen. Pp. 733-734.
[4] Dehasse, Joël. Mon chien est heureux, Éditions Odile Jacob, 2009, p. 38.